Si prendre un rendez-vous chez le médecin au milieu de la nuit, en moins de 10 minutes, sans avoir besoin de téléphoner vous paraît aussi improbable que souhaitable, nous avons une bonne nouvelle. Cela est parfaitement possible depuis plusieurs années et pourrait bientôt devenir la norme.

Depuis 2007, les sites de prises de rendez-vous en ligne promettent de faciliter une relation patient-médecin depuis longtemps cantonnée au téléphone. Pour un coût moindre, les services proposés permettent de remplacer ceux d’un secrétaire médical : gestion d’un agenda médical en ligne, secrétariat médical à distance etc.

Associé à la promesse de se faire connaître de la patientèle et de réduire les rendez-vous non honorés, il n’est pas surprenant que ce genre de services ait le vent en poupe.

Premier à proposer ce type d’offre, l’américain ZocDoc et ses quelques 600 salariés est un bel exemple de réussite. Solidement implanté aux États Unis, le site représente même un modèle assumé pour la start-up Doctolib. Tandis que l’indien Practo s'assure la première en Asie, le français Doctolib ambitionne pour sa part de se frayer une place en Europe. Présent depuis 2013, le site n’est plus un nouvel arrivant, pourtant il continue de croître à un rythme exponentiel. Après avoir posé le pied en Allemagne et la signature d'un vaste contrat de partenariat avec l'AP-HP, l'entreprise qui compte aujourd'hui 300 salariés en souhaite rapidement 150 de plus. L'objectif semble possible, puisqu'en janvier 2017, la start-up vient d'achever une nouvelle levée de fond de 26 millions d’euros confirmant ainsi son excellente santé et le réalisme de ses ambitions européennes.

Chez Testapic, nous avons souhaité passer au crible des tests utilisateurs les services proposés par Doctolib. Du 15 au 17 février, nous avons demandé à 22 de nos testeurs de découvrir le site en y effectuant des tâches courantes comme des prises de rendez-vous.
La santé étant un domaine sensible et pour lequel tout public est concerné, nous avons voulu vérifier si les services de Doctolib étaient simples d’utilisation y compris pour des utilisateurs du 3eme âge. Pour cela nous avons constitué deux groupes de 11 testeurs. L'un étant constitué d'internautes compris entre 20 et 35 ans, l'autre groupe ne comprenant que des utilisateurs de 60 à 78 ans.
Nous souhaitions également connaitre le niveau de confiance des utilisateurs envers le site. L'objectif étant de savoir si au-delà du confort de navigation, nos testeurs pouvaient envisager l'adoption de la plateforme pour leurs propres besoins.

Nous avons abordé ce test avec 3 questionnements :

  1. Ce site est-il facilement utilisable ? Quels sont les points forts et les points faibles de la navigation ?
  2. Les utilisateurs comprennent-ils le fonctionnement de ce service ? Le trouvent-ils utile ?
  3. La santé est un domaine particulièrement sensible et confidentiel. Les utilisateurs perçoivent-ils cela comme un frein à l’adoption de ce service ?

Premier contact

Une page d'accueil chaleureuse et fonctionnelle

Plutôt épuré, avec ses illustrations rondes, le design de la page d’accueil est jugé assez plaisant par les testeurs. Le service est résumé par une phrase explicite surplombant une large barre de recherche “Prenez rendez-vous en ligne chez un médecin ou un dentiste - c’est immédiat, simple et gratuit”. Les options annexes : “accès au compte”, “Besoin d’aide”, “Accès praticiens” se faisant discrets en haut à droite.

Dans cette configuration, l’affordance de la barre de recherche fonctionne pleinement. Les utilisateurs sont nombreux à effectuer spontanément leur première recherche sur le site, tandis que l’aide n’est pratiquement jamais consultée.

La partie basse est un peu plus “touffue” comme le lui reprochent certains utilisateurs. Elle est néanmoins fonctionnelle, puisque les informations essentielles comme les pages “CGU” où “Confidentialité” sont toujours retrouvées en un minimum de temps.

Le seul point pouvant poser problème est justement le retour sur cette page depuis une autre page du site. Une difficulté qui concerne principalement des utilisateurs âgés, bien qu’ils ne soient pas les seuls.

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Un pictogramme explicite à côté du label “Doctolib” pourraient éventuellement aider ces utilisateurs à retrouver leur chemin.

En conclusion cette page semble parfaitement remplir son rôle : elle rassure les utilisateurs et permet de les orienter vers le moteur de recherche.

Le Moteur de recherche, un passage obligé et laborieux

C’est à cette étape qu’apparaissent les premières difficultés. En effet, comme la plupart de ses concurrents, Doctolib propose un moteur de recherche comportant 3 zones de saisie.

La recherche peut donc s’effectuer soit à partir d’un nom (de médecin ou d’établissement), soit à partir d’une spécialité médicale. Dans les deux cas, la zone géographique est à préciser en complément.

Ce champ géographique ne pose aucune difficulté de navigation, mais ne recherchez pas un médecin en Occitanie ou dans les Haut-de-France : les nouvelles régions ne sont pas encore prises en compte. La bonne surprise est que ce champ accepte les recherches à partir d’un code postal, fonction que l’on ne peut pas deviner avant d’avoir essayé.

Le champ central, permettant la recherche par “Spécialité”, fonctionne relativement bien, notamment grâce à sa liste de suggestions. Par conséquent, les utilisateurs effectueront la grande majorité de leurs recherches à partir de ce champ.

Le champ “Médecin, établissement” cumule les défauts et constitue le véritable point faible de cette barre de recherche, si ce n’est celui du site.

Tout d’abord, les suggestions y sont beaucoup moins pertinentes, elles ont notamment le défaut de ne pas tenir compte du critère géographique saisi dans le champ “Où ? (adresse, ville)”. À titre d’exemple, si un utilisateur se localise dans la ville de Nantes et qu’il y cherche une clinique, les deux premières suggestions se situeront à Paris et Marseille.

D’autre part, ce champ à la mauvaise habitude d’effacer le texte saisi après chaque recherche. Ainsi l’utilisateur qui souhaite obtenir plus de résultats en changeant la zone géographique, devra entrer une deuxième fois le nom du médecin souhaité.

Si les recherches aboutissent rarement de cette manière, c’est aussi parce que le nombre de médecins et surtout d’établissements affiliés à Doctolib est encore restreint. Avec 7 000 praticiens inscrits sur le site parmi les + de 259 000 médecins et dentistes exerçant en France, la probabilité d’y retrouver votre médecin habituel reste encore faible. Cette recherche par “spécialiste/établissement” se révèle donc probablement plus utile aux habitués du site souhaitant retrouver des médecins qu’ils ont déjà consulté via Doctolib qu’aux nouveaux utilisateurs comme le sont pour la plupart les testeurs ayant réalisé ce test utilisateur.

Enfin, il arrive que l’indication “OU” entre les deux champs de recherche passe inaperçu. Et une fois les 3 champs complétés, le résultat de la recherche aboutit généralement à une page blanche plutôt frustrante.

Globalement, ce format de recherche à mi-chemin entre le formulaire et le champ unique reste source de beaucoup d’insatisfactions de la part des utilisateurs.

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La fusion des deux premiers ou le remplacement des 3 champs par une zone de saisie unique acceptant des requêtes tels que “Dentiste Metz” réduirait probablement le temps consacré par l’utilisateur. Quitte à améliorer ensuite le tri des résultats avec un filtre supplémentaire en page de liste.

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Les nouvelles régions devraient être prises en compte et dans le placeholder, un code postal pourrait indiquer aux utilisateurs que ce type de recherches est possible.

Enfin, après chaque recherche aboutissant à peu de résultats dans une zone géographique, la barre de recherche pourrait proposer un bouton “Élargir la recherche”. Cela éviterait aux utilisateurs de retaper leur recherche.

Un parcours de réservation plébiscité par les utilisateurs

Pages de listes : des infos et des contrôles

Une fois passés les écueils du moteur de recherche, la satisfaction des utilisateurs est généralement au rendez-vous.
À gauche d’une carte, les propositions s’affichent par bloc. Chacun comportant une photo, quelques informations sur le praticien et surtout un agenda de ses disponibilités.
Le design est approuvé et les reproches se font beaucoup plus rares qu'à l’étape précédente. La majorité des critiques portent sur le faible nombre de résultats proposés, un problème hérité d’un moteur de recherche restrictif, notamment sur le critère géographique.

Dans le cas où le moteur de recherche ne trouve pas de résultats pour une zone géographique donnée, proposer systématiquement les praticiens similaires exerçants dans un rayon plus large.

Le faible nombre de résultats proposés est d’autant plus dommage que la page de liste dispose de 3 filtres de recherche particulièrement efficaces.

Des filtres qui pourraient d’ailleurs gagner en visibilité, car en plus d’être élégants, les critères qu’ils proposent s’adaptent à la spécialité du médecin recherché (comme les motifs de consultation). Un détail apprécié des utilisateurs lorsqu’ils le détectent.

Les filtres ne sont pas toujours détectés, il pourrait être utile d’augmenter leur visibilité. Soit en accentuant le contraste et la police de ces derniers, soit en les rattachant davantage au moteur de recherche.

Deux suggestions d’utilisateurs sont cependant récurrentes à propos des honoraires dont le vocabulaire (conventionné secteur 1, secteur 2) n’est pas toujours explicite. Cette explication existe en bas de page, mais n’est que rarement consultée.

Concernant les honoraires, plusieurs utilisateurs souhaitent que le prix de la consultation soit visible directement depuis la page de liste. Tandis que d’autres réclament une explication du vocabulaire employé à propos des tarifs (sous la forme de bandeau explicatifs).

Enfin, le moteur de recherche propose des spécialités qui ne correspondent pas aux diplômes délivrés en France. Partir du trouble à soigner n’est en soit pas une mauvaise idée, mais les résultats proposés peuvent alors porter à confusion. Dans ce test, nous avons demandé aux testeurs de rechercher un médecin du sommeil. Bien que les praticiens proposés semblent avoir une spécialisation dans ce domaine, l’hétérogénéité des types de spécialiste (ORL, pneumologues) a surpris plus d’un testeur.

Dans le cas d’une recherche hors spécialité reconnue, indiquer sur la page de liste que les propositions correspondent à des praticiens qui ont une expertise particulière sur le sujet recherché.

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Reste que dans l’ensemble, la page est réussie. Assez visuelle, avec cartes et photos, elle offre des contrôles aux utilisateurs pour choisir un créneau et passer directement à la prise de rendez-vous. Les informations données sont claires, le design en impressionne plus d’un, et les utilisateurs finissent par cliquer sur la fiche du premier praticien disponible !

Fiches médecin : l'attention du détail

Les fiches de praticiens produisent elles aussi un bon effet sur les visiteurs. Ces derniers sont accueillis par des photos, une courte description du médecin accompagné des informations essentielles à la visites (moyens de paiement accepté, adresse).

En descendant vers le milieu de page, il se retrouve face à un formulaire de prise de rendez-vous. Un formulaire suffisamment clair et attractif pour que les utilisateurs s’y arrêtent et commencent à le compléter avant de jeter un œil au pied-de-page.

Les informations situées en bas de page y sont moins essentielles, mais elles méritent pourtant le détour. Le parcours du médecin y est détaillé et l’on y retrouve les informations d’accès agrémentées d’un plan, les langues parlées par le médecin… Les informations sont précises et leur présentation si soignée qu’elles achèvent de convaincre les utilisateurs du sérieux de la plateforme.

La page de détail a pour objectif d’orienter les utilisateurs vers le formulaire d’inscription, cependant plusieurs utilisateurs font remarquer que ce pied de page pourrait gagner en visibilité.

Une incitation à descendre sous le questionnaire ou en faisant remonter des informations du bas vers le haut de la page. Certains utilisateurs proposent également la possibilité d’agrandir les photos du praticien avec un simple survol de la souris.

Le tunnel de prise de rendez-vous

La suite de la navigation est un long fleuve tranquille : prise de rendez-vous, création de compte. Des formulaires courts et lisibles qui offrent néanmoins des fonctionnalités intéressantes. Sur une prise de rendez-vous en hôpital, des champs dynamiques permettent de choisir le médecin ou le motif de consultation. Résultat: parmi nos 22 testeurs, aucun n’a déclaré avoir éprouvé la moindre difficulté pour prendre un rendez-vous.

Cette prise de rendez-vous conduit ensuite au formulaire d’ouverture du compte pour finaliser l’opération. Le formulaire suit lui aussi les mêmes normes de simplicité. Un téléphone, un e-mail et un mot de passe suffisent à valider cette étape. Nous n’avons pas posé pour consigne aux utilisateurs de se créer un compte, mais ces derniers l’ont observé et jugent à l’unanimité que l’utilisation du numéro de téléphone est utile et justifié (notamment pour les rappels).

Dans le formulaire d’inscription, les champs sont obligatoires sans que cela soit indiqués. Il serait préférable de les accompagner d’une astérisque.

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Lors de l’étape de création de compte, un fil d’Ariane apparaît au dessus du formulaire. Celui-ci n’est lui pas forcément indispensable au guidage. Au contraire, il induit en erreur certains utilisateurs qui souhaiteraient retourner à l’accueil en cliquant dessus (ce qui ne fonctionne pas).

Dans cette situation, le fil d’Ariane devrait être rendu cliquable.

Un solide capital confiance

Une des raisons de la fluidité de la navigation sur Doctolib réside peut être dans la compréhension du site en lui-même. Dès la page d’accueil, les utilisateurs saisissent les grandes lignes du fonctionnement du site. Sans forcément savoir qu’il existe un système de standards téléphonique à distance, la plupart des utilisateurs comprennent qu’ils peuvent réserver un médecin, et que les informations du site proviennent d’un accord entre Doctolib et les différents praticiens. Cette bonne interprétation du site évite les confusions avec un service d’annuaire, comme les Pagesjaunes.

Une fois le service bien compris (réservation de rendez-vous), les informations du site sont alors perçues comme une valeur ajoutée et un gage de sérieux. Les éléments de réassurance (pop-up, où rappel de rendez-vous) sont accueillis favorablement.

Sur un sujet aussi sensible que la santé, nous avons voulu savoir si la confiance dans le service pouvait être un frein à l’utilisation du site. Nous avons essayé d’évaluer le niveau de confiance à différentes étapes du protocole de test.

Et selon nos retours, il s’avère que cette confiance est très élevée. Point très positif, on remarque que chez la quasi-totalité des utilisateurs, la confiance et la satisfaction dans le site semblent augmenter au cours de la navigation (notamment en parcourant les pages de liste et de détails).

Concernant les CGU et l’utilisation des données, il existe 2 pages différentes sur le site. L’une est un texte juridique officiel et la seconde, nommée “Confidentialité”, résume une politique d’utilisation des données qui semble assez protectrice pour les utilisateurs.

Les utilisateurs de ce test en mode crowdtesting n’ont eu aucune difficulté à trouver l’une ou l’autre de ces pages, mais tandis que la page “Confidentialité” rassure pleinement les utilisateurs, ceux qui trouvent la page “Politique relative à la protection des données personnelles” sont forcément un peu intimidés par la longueur et l’austérité du texte de loi.

En mettant en valeur cette page de résumé, Doctolib pourrait certainement rassurer quelques curieux en recherche d’informations sur le modèle économique du site.

Doctolib, un pari réussi ?

Simplicité, compréhension, confiance dans le service : après avoir analysé la navigation de nos différents testeurs, nous constatons que le site Doctolib répond favorablement aux questions que nous avions à son sujet.

Les critiques des utilisateurs portant sur un moteur de recherche très perfectible ne doivent pas faire oublier des retours dans l’ensemble très positifs. Le design est plébiscité, et les fonctionnalités sont toutes jugées utiles.

D’autre part, il apparaît sans ambiguïté que ce site est accessible à un très large public. Avec une moyenne de 32 et 62 ans, nos groupes de testeurs étaient séparés par 30 ans d’écart. Au final, nous n’avons pas constaté de différences en termes de navigation ou de perception. Les remarques et appréciations ont été similaires dans les 2 groupes et aucun testeur ne semble avoir rencontré de difficultés spécifiques à son âge. En cela, Doctolib réussit pleinement son pari : proposer un service moderne en ne laissant aucun utilisateur de côté.

Mais le plus grand atout de Doctolib est certainement que les utilisateurs jugent le service utile pour eux et pour leurs proches. Par conséquent, outre une indéniable réussite en terme de design, il jouit d’un intérêt particulier. Après une expérience de navigation agréable, les utilisateurs sont disposés à ouvrir un compte, beaucoup se disent spontanément prêt à parler de ce service autour d’eux et certains souhaiteraient même entrer davantage d’informations si cela leur permettait d'accéder à de nouvelles fonctionnalités.

En résumé, Doctolib est un site abouti, qui répond à un besoin concret des utilisateurs. Malgré un système de recherche encore perfectible, la navigation y est fluide, l’ensemble est agréable à utiliser. Doctolib est donc bien parti pour gagner le cœur des patients. C’est déjà beaucoup. Nous lui souhaitons désormais bonne chance pour poursuivre son expansion auprès des praticiens.

Vous aussi, vous souhaitez faire tester vos interfaces par de vrais utilisateurs en mode crowdtesting ?

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